« Bien que le chemin soit simple et lisse pour les hommes de bonne volonté, celui qui le parcourt ne voyagera pas loin, et ne le fera qu’avec difficulté, s’il n’a pas de bons pieds: c’est-à-dire du courage et un esprit persévérant.”
Saint Jean de la Croix
Dom Hubert van Zeller aborde cette lutte de persévérance dans son classique de 1950 Nous Travaillons Tant Que la Lumière Dure, récemment réédité par The Cenacle Press.
Il analyse le piège dans lequel tombent de nombreux croyants autrefois zélés: le bourbier du presque-saint. La grâce est facilement donnée, mais souvent ignorée et souvent perdue. Ceux qui persévèrent jusqu’au bout sont peu nombreux. Travailler vraiment jusqu’à la fin de la lumière, c’est être capable de dire “J’ai combattu un bon combat, j’ai terminé mon cours, j’ai gardé la foi” (2 Timothée 4:7).
Travailler comme Mission
Le langage du travail est utilisé tout au long du livre pour faire comprendre au lecteur la nature et les exigences d’une vocation. Le travail a certainement été corrompu en labeur par la Chute, mais il a été mis sous le joug de la grâce et perfectionné par Christ en vocation.
Dom van Zeller identifie le travail comme la matière de notre vocation, comme le moyens de notre salut dans notre appel particulier de Dieu:
La sainteté n’est pas quelque chose qui devrait être considéré comme venant au-dessus de l’œuvre d’un homme, la sanctifiant de l’extérieur et la rendant digne d’être présentée à Dieu. Il devrait plutôt être considéré comme émergeant de l’œuvre et donné à Dieu en union avec elle.
Le travail d’une personne ne se réfère pas à une simple corvée qui remplit le temps, rapporte de l’argent et offre un style de vie, mais plutôt aux tâches particulières que Dieu veut accomplir à travers lui dans cette vie. Le cadrage de Dom van Zeller nous rappelle ainsi d’exercer les devoirs de nos états dans la vie comme l’ultime appel à la sainteté.
Lumière Décroissante
Toujours conscient que la lumière de la grâce peut être retirée à tout moment, Dom van Zeller avertit que nous avons le devoir de faire usage de la grâce pendant qu’elle brille sur nous, de peur de la perdre, de perdre la sainteté concomitante et de contrecarrer la volonté de Dieu.
Mettant en garde contre le sort du “quasi-saint”, Dom van Zeller explique que l’ardeur zélée est facile à trouver, mais difficile à maintenir. Il souligne que pour éviter ce plateau spirituel (et même cette régression), nous devons nous engager à accepter chaque grâce qui se présente à nous, dans le timing de Dieu:
Refuser délibérément l’offre de sainteté crée une famine dans l’âme qu’aucune compensation ne peut satisfaire. Une grâce qui a été déclinée crée, par son absence même, une inflammation qui a toutes les qualités douloureuses de la pénitence sans aucun de ses mérites.
La sainteté n’est pas contenue dans un moment exceptionnel, mais est constituée d’une vie d’adhésion à la foi et à la pratique de la vertu. La persévérance, la patience et le courage composent la matière de la vertu héroïque, tout comme le sacrifice d’un martyr.
La Vocation du Mariage
Les relations humaines présentent des défis et des opportunités uniques pour la persévérance de l’âme dans la vertu, et ainsi Dom van Zeller-qui a servi de directeur spirituel aux couples mariés et précédemment écrit sur le bonheur dans la vie conjugale-accorde une attention particulière à “comment gérer les affections.”
Il discute du mariage sacramentel proprement dit comme moyen de sanctification des époux et des enfants. Inversement, le mariage fondé sur l’émotion ou la mondanité a de tels effets néfastes sur l’âme qu’il peut entraver le salut, la fin vers laquelle est orienté un vrai mariage sacramentel.
L’amour est le sacrifice de soi. Les époux aiment Dieu les uns à travers les autres par une mort quotidienne à soi-même, non en privilégiant le confort ou les sentiments amoureux. Ironiquement, le bonheur ne vient pas quand il est poursuivi pour sa propre fin; il vient quand Sainteté c’est la fin.
L’amour est le don de Dieu dont l’homme ne peut jouir, paradoxalement, que lorsqu’il est prêt à le rendre. En la partageant avec le donateur, il la possède; en la thésaurisant et en la dépensant pour lui-même, il en perd la joie. Le mariage ne peut être le succès que Dieu veut qu’il soit que lorsque le caractère sacramentel est accepté et vécu.
L’auteur parle de cet esprit de sacrifice caractérisant également la phase de parade nuptiale, notant que le discernement du mariage doit se dérouler selon les mêmes principes qui définissent un bon mariage:
Un amour qui expérimente avant sera tout aussi prêt à expérimenter après. Et peut-être avec quelqu’un d’autre. L’amour qui n’est pas assez fort ou assez noble pour retenir la passion de l’un ou de l’autre avant le mariage ne sera certainement pas de la qualité pour survivre à la tension qui lui sera imposée plus tard.
Il avertit en outre que les péchés d’impureté empoisonnent le bonheur conjugal futur:
Pour que le point culminant vienne avant ce qu’il est destiné à perfectionner et à culminer, il y a une inversion qui ne peut que promouvoir des inversions similaires tout au long de la ligne.
Nous pouvons voir ici l’importance de persévérer dans la vertu non seulement pour éviter le péché, mais pour nous préparer à accomplir notre vocation comme Dieu l’a voulu. Une vocation poursuivie pour de mauvaises raisons peut éloigner l’âme de Dieu.
“La Conscience Étouffée”
Dom van Zeller identifie de nombreuses distractions mondaines qui détruisent pernicieusement la conscience du presque-saint en l’absence de persévérance active dans la foi et la vertu. Un désir désordonné de confort est l’un des plus grands “silencieux” qui refroidit le zèle initial. Loin de l’horreur explicite du péché, le confort est un ennemi sournois qui détourne progressivement l’âme de Dieu et la ramène aux plaisirs du monde. Un désir de réconfort et de plaisir recouvre la conscience de couches d’éloignement de la Vérité, jusqu’à ce que “la bonté ne fasse plus appel à ses propres mérites.” Le zèle a été tué par la banalité du confort. Une conscience réduite au silence permet ainsi à l’âme de faire des concessions à un comportement de plus en plus mauvais.
Le Presque-Saint
La tragédie classique est définie comme telle non pas simplement parce qu’elle est triste, mais parce qu’elle est inévitable. Ce livre démontre que la fuite d’une âme de la grâce est la conséquence inévitable d’une vie qui manque de réengagement continu au zèle initial. L’échec ultime du presque-saint n’est pas de conviction, mais de persévérance.
Nous prions pour la persévérance finale dans chaque Je vous salue Marie, suppliant Dieu que la lumière de la grâce dure jusqu’à ce que nous ayons terminé le travail de notre vie. La vie est un marathon qui se court au sprint. Il y a des moments de repos, mais jamais de licence. La persévérance est le remède peu glorieux aux échecs de zèle, de courage et de résolution.
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Nous Travaillons Tant Que la Lumière Dure, est disponible dès maintenant à partir de La Presse du Cénacle au prieuré Silverstream.